Quand Oleksandr Usyk a décidé de monter chez les poids lourds en 2019, peu de gens y croyaient vraiment. Trop petit, pas assez puissant, incapable de rivaliser physiquement avec les mastodontes de la division — voilà ce que disaient les sceptiques. Pourtant, quelques années plus tard, le boxeur ukrainien a non seulement fait taire les critiques, mais il a aussi ridiculisé les plus grandes figures de la catégorie reine, les faisant paraître lents, dépassés, et parfois même effrayés.

Anthony Joshua, Tyson Fury… ces noms résonnent comme ceux des géants modernes de la boxe. Pourtant, chacun d’eux a été battu — ou plutôt, déconstruit — par un homme qu’on disait trop léger pour le rôle. Aujourd’hui, Usyk est le champion incontesté des poids lourds. Et il l’a fait à sa manière : avec finesse, intelligence et une détermination hors du commun.
L’ascension d’un maître technicien
Avant de monter en poids lourds, Usyk avait déjà tout prouvé chez les poids cruiser. Champion incontesté, champion olympique, invaincu… Il dominait ses adversaires non par la force brute, mais par sa maîtrise du ring, sa mobilité exceptionnelle et une vision tactique rare.
Mais changer de catégorie pour affronter des hommes bien plus lourds, plus grands, et plus puissants physiquement ? Beaucoup y voyaient une mission suicidaire. Pourtant, Usyk a prouvé que le cerveau pouvait encore dominer la bête.
En 2021, il affronte Anthony Joshua, colosse britannique d’1m98 pour plus de 110 kg. Résultat : une démonstration de boxe pure. Usyk danse, esquive, contre, et s’impose sur décision unanime. Le match retour confirmera son triomphe.
Puis en mai 2024, Usyk affronte Tyson Fury — 2m06, invaincu, considéré comme le plus technique et imprévisible des poids lourds modernes. Ce combat en Arabie Saoudite entre deux styles opposés devient historique : Usyk devient le premier champion unifié des poids lourds depuis plus de 20 ans.
Humilier par la technique
Usyk ne gagne pas seulement. Il expose. Il fait paraître ses adversaires maladroits, lents, et désorientés. Là où d’autres se reposent sur leur physique, Usyk impose une pression mentale et tactique. Contre Fury, il a brisé le rythme du « Gypsy King », le forçant à boxer en réaction — une chose rare pour Fury.
Le 9e round de leur combat reste un moment clé : Usyk, implacable, fait vaciller Fury, le pousse contre les cordes, et manque de peu le KO. À partir de là, Fury semble perdu. L’issue du combat ne fait plus de doute : Usyk est le patron.
Et avec ce triomphe, c’est toute l’histoire des poids lourds qui s’écrit autrement. Usyk n’est pas “trop petit”. Il est tout simplement trop bon.
Une nouvelle ère du noble art
Pendant des décennies, les poids lourds ont été synonymes de puissance, de KO fulgurants, de bêtes physiques. Mais Usyk a ramené la discipline vers sa dimension la plus noble : l’art de boxer. Il a redonné ses lettres de noblesse à la science du mouvement, de la feinte, du timing.
Joshua, Fury, et bientôt peut-être Wilder : ces noms évoquent la peur. Usyk, lui, inspire le respect. Non par son physique, mais par sa capacité à déconstruire des carrières entières avec une précision chirurgicale.
Il ne frappe peut-être pas plus fort. Mais il frappe mieux.
Une légende en construction
À 37 ans, Oleksandr Usyk n’est pas éternel. Mais ce qu’il a accompli est déjà historique. De champion olympique à champion incontesté des cruiserweights, puis désormais champion unifié des lourds — très peu ont réussi un tel parcours.
Et il l’a fait en humiliant les plus grands. Pas par arrogance, mais avec humilité. Pas avec des mots, mais avec ses poings. Pas avec des KO violents, mais avec une boxe tellement brillante qu’elle fait passer les autres pour des amateurs.
Les gens riaient quand on parlait de lui comme champion des lourds. Aujourd’hui, c’est lui qui rit, ceintures sur les épaules, respect du monde entier à ses pieds.
Oleksandr Usyk était “trop petit” pour rêver grand. Aujourd’hui, il est le plus grand d’entre eux.